Le gouvernement prévoit de déléguer la prescription de lunettes aux « opticiens-optométristes »

Publié le 11/09/2014

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Le pré-projet de loi « croissance et pouvoir d’achat », dévoilé par Les Echos, prévoit d’étendre la faculté de prescription des lunettes aux opticiens-optométristes, conformément à ce que préconise le rapport de l’Inspection générale des Finances.

 

Le pré-projet de loi (promis par Arnaud Montebourg) sur la réforme des professions réglementées souligne qu’à l’horizon 2020, la diminution des effectifs des ophtalmologistes avoisinera 25% (dans une hypothèse optimiste), alors que les troubles de la vue devraient augmenter d’au moins 15%. Par ailleurs, les dépenses en ophtalmologie progressent de 5% par an et sont marqués par une progression des dépassements d’honoraires (taux passé de 29% à 60% entre 1990 et 2010). Dans ce contexte, le pré-projet de loi évoque une solution d’accès aux soins, déjà mise en œuvre dans plusieurs pays européens, qui consisterait « à confier certains actes, tels la prescription de lunettes correctrices ou de lentilles de contact, à des opticiens-lunetiers spécialement formés à la réalisation de ces actes, en maintenant cependant aux médecins spécialistes que sont les ophtalmologistes la réalisation des actes de soins des affections de l’œil autre que de simple correction visuelle. » Le texte précise qu’une « telle profession existe déjà : il s’agit des optométristes formés sur 2 ans, après validation d’un diplôme d’opticien-lunetier ou équivalent. » Il souligne que le master en sciences de la vision sanctionne 5 ans d’études après le bac ; et que 2 000 opticiens-optométristes sont déjà formés et « en attente de pouvoir exercer pleinement leurs compétences. Il s’agit donc de libérer un potentiel existant. » Le gouvernement argumente sa proposition en rappelant que l’optométrie est reconnue dans de nombreux pays et donne des résultats positifs, car « l’optométriste travaille en complémentarité avec l’ophtalmologiste et non en concurrence avec lui. »

 

Modifier le code de la santé publique pour créer une quatrième profession

Pour faire évoluer les choses en ce sens, le pré-projet de loi souligne la nécessite de légiférer. Il constate que le système de coopération mis en place par la loi HPST « peine à décoller », notamment en raison de la complexité des procédures, et qu’il faut clarifier l’organisation de la filière de santé visuelle. Bercy ne croit pas aux quelques « exemples de coopération encourageants » ni aux cabinets aidés dotés d’orthoptistes salariés, qui « ne peuvent suffire à régler la question de l’accès à la prescription de produits optiques. » Il faut donc « organiser un vrai transfert d’acte général inscrit dans la loi au profit de l’opticien optométriste, lui permettant la mesure de la réfraction et la prescription d’optique correctrice, actes pour la réalisation desquels il est spécialement formé, à la différence de l’orthoptiste, très majoritairement compétent en matière de bilan et de rééducation des déséquilibres oculomoteurs et des déficiences visuelles d’origine organique ou fonctionnelle. » La mesure consisterait en la création d’un nouveau chapitre créant la profession « d’opticien-lunetier qualifié en optométrie » dans le code de la santé publique. Se voulant rassurer, le texte insiste sur le fait que « les optométristes sont suffisamment formés pour détecter des pathologies oculaires basiques et diriger le cas échéant les patients vers l’ophtalmologiste », et que ce système n’empêchera pas les patients de continuer à prendre rendez-vous directement avec un ophtalmologiste.

Selon le ministère, sur la base d’une consultation « optométrie » à 20 euros, remboursée à 50 euros, les économies réalisées via cette mesure atteindraient 100 millions d’euros pour l’assurance-maladie et 260 millions d’euros pour les assurés ou les Ocam.

 

Fronde du ministère de la Santé et des ophtalmologistes en vue

Pour avancer sur le dossier, Bercy entend consulter le Snof (Syndicat national des ophtalmologistes de France), qui s’est toujours vivement élevé contre l’optométrie, et l’AOF (Association des optométristes de France), mais ne mentionne pas les autres syndicats de la profession. Il prévoit par ailleurs de consulter le ministère de la Santé, qui risque aussi de lui mettre des bâtons dans les roues. En effet, il y a quelques jours, celui-ci affirmait que le gouvernement n’envisageait pas de créer une quatrième profession telle que celle des optométristes, et que les réponses résidaient dans les délégations de tâches aux orthoptistes et aux opticiens, ainsi que sur une meilleure répartition des médecins.

 

Ci-dessous, la modification du Code de la santé publique prévue par Bercy.

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