Coopération pour les soins visuels : le contrat proposé par le gouvernement fâche les ophtalmos

Publié le 10/11/2015

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L’article 42 du projet de loi de financement de la sécurité sociale 2016 (PLFSS 2016) prévoit une aide visant à inciter les ophtalmologistes à recruter un auxiliaire médical, afin de développer le travail aidé pour diminuer les délais de rendez-vous et augmenter le nombre de patients pris en charge. Mais pour le Snof (Syndicat national des ophtalmologistes de France), le dispositif prévu est une « réponse inéquitable et précaire. »

 

Le contrat individuel de coopération pour les soins visuels s’adresse aux ophtalmologistes libéraux de secteur 1 et conventionnés avec l’assurance maladie pour les inciter à recruter ou à former un professionnel qui, selon les informations transmises par la DGOS, est « autorisé par la législation à pratiquer les actes de soins oculaires (examens de dépistage, rééducation, examen de l’acuité visuelle…). » En l’état actuel du texte, ce contrat, conclu pour une durée de trois ans non renouvelable, contiendra des engagements individualisés de la part du médecin (portant sur le nombre de patients reçus en consultation, le respect de tarifs conventionnels, la mise en place d’actions destinées à favoriser la continuité des soins…) et des objectifs en matière d’organisation des soins (formation ou recrutement d’un auxiliaire médical, participation à des actions de dépistage et de prévention…). Une contrepartie financière maximale de 10 000 euros annuels (avec une moyenne de 6 500 euros par professionnel) sera accordée. Des « conditions particulières » relatives à la conclusion de ce contrat seront précisées par décret en Conseil d’Etat : elles porteront notamment sur la profession de l’auxiliaire médical et sur les modalités de son recrutement.

 

Une aide jugée insuffisante pour le Snof

Mais pour le Snof, ces dispositions doivent être modifiées par le Sénat, qui examine en ce moment le PLFSS, « pour que les mesures soient adoptées en pratique. » Le syndicat juge que le montant de l’aide est trop faible, « les frais occasionnés par le travail aidé étant de l’ordre de 60 000 euros minimum par an pendant 5 ans ». Par ailleurs, une fois les trois années passées, « les ophtalmologistes devront faire face à l’augmentation de leurs charges, alors qu’en travail aidé, celles-ci passent habituellement de 45 à 60% du chiffre d’affaires du cabinet. » Le Snof considère qu’il s’agit d’une rupture d’équité par rapport au contrat collectif proposé aux centres et maisons de santé, qui « n’est destiné qu’à développer une offre à temps partiel de consultation d’ophtalmologie, mais qui offre pourtant une allocation moyenne de 15 000 euros par an, de plus non limitée dans le temps. »

 

Quid des optométristes ?

Les ophtalmologistes s’inquiètent aussi de la nature de l’auxiliaire médical avec lequel ils travailleront. Leur syndicat rappelle que les orthoptistes sont les « partenaires privilégiés » dans le cadre du travail aidé et que la priorité doit leur être donné. Or, la commission des affaires sociales du Sénat souligne que, si « les éléments transmis par la DGOS laissent transparaître que les orthoptistes sont en fait les seuls professionnels visés, le partage des tâches entre médecins ophtalmologistes et optométristes salariés existe déjà non seulement au sein de cabinets libéraux, mais également dans certains services hospitaliers – les optométristes pouvant fournir une aide non négligeable à la mesure de la réfraction. » Sans se prononcer sur l’opportunité de la reconnaissance d’une quatrième profession au sein de la filière visuelle, le rapporteur de la commission estime ainsi, à la suite du rapport de l’Igas, qu’« il n’est pas acceptable que des centaines de jeunes formés soient voués à l’expatriation ou à des subterfuges variés permettant leur exercice sous des montages diversd’autant que les compétences de ces professionnels pourraient être tout à fait profitables à la filière visuelle. Si le choix de maintenir le statu quo sur l’organisation de la filière est maintenu, il est indispensable de clarifier en conséquence la formation des optométristes, qui, en l’état actuel, ne peut leur offrir que des débouchés partiellement insatisfaisants. »

 

Risque d’une ophtalmologie à deux vitesses ?

« L’accès au travail aidé des médecins en secteur 1 est un enjeu crucial pour répondre à la demande de soins des années à venir. Nous espérons que le Sénat rendra ce contrat renouvelable pour donner plus de visibilité aux médecins et les inciter à embaucher sur le long terme, et aussi que l’aide financière sera plus incitative. Nous avons à faire face à une urgence sanitaire vu l’importance des départs en retraite ces prochaines années. Ce contrat doit être à la hauteur de l’enjeu, quitte à ce qu’il soit réévalué au bout des 3 ans. Sinon, une ophtalmologie à 2 vitesses va s’installer rapidement », explique Thierry Bour, président du Snof.

 

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