L’Opticien-Lunetier a sondé les opticiens français pour prendre le pouls de ce segment d’activité. Principales conclusions : la vente de lunettes enfant représente une part non négligeable du marché, avec des prix raisonnables sans être low-cost. Elle vous semble une mission essentielle, même si peu d’entre vous recourent à la formation pour améliorer vos compétences dans ce domaine.
Le segment enfant, un incontournable au poids non négligeable
Plus ou moins développée selon les magasins, l’activité enfant reste un indispensable : seuls 1,7% d’entre vous ne la pratique pas. En 2013, celle-ci a représenté de 2 à 5% du chiffre d’affaires pour 36% des points de vente, et entre 5 et 10% pour 33% d’entre eux. Ce segment dépasse même les 10% du CA pour 18% des magasins. Ces tendances sont quasiment les mêmes chez les opticiens sous enseigne et les indépendants.
L’enfant mérite son espace
Plus de 7 opticiens sur 10 déclarent avoir un espace enfant bien identifié et aménagé pour accueillir leurs petits clients.
La superficie de cet espace est très variable : il est inférieur ou égal à 3m² dans 22,5% des cas, compris entre 3 et 6m² dans 29% et entre 6 à 10m² dans 24,5%. Les espaces supérieurs à 10m² concernent 25% des points de vente.
Les licences ont la cote
Pour l’offre enfant, vous êtes très nombreux (83%) à miser sur les valeurs sûres, notamment les grandes licences affectionnées par vos jeunes clients. Seuls 17% d’entre vous proposent essentiellement des montures créateurs. Sans surprise, ce segment “créateur enfant” est davantage privilégié par les indépendants (23%) que par les magasins sous enseigne (5,17%).
Une offre souvent limitée à quelques dizaines de montures
Pour la majorité des magasins (52,5%), l’offre de montures enfant se compose de 50 à 100 modèles. Presque un tiers d’entre vous (29,4%) propose tout de même entre 100 et 200 modèles, mais seuls 8,7% présentent une offre supérieure à 200 montures. Les offres inférieures à 50 modèles ne concernent que 9,4% des sondés.
La formation, parent pauvre de l’activité enfant
Alors que tous les experts insistent sur la nécessité de se former pour équiper au mieux les petits amétropes, la majorité d’entre vous semble rester sourde à ce message. En effet, 73% des opticiens n’ont jamais suivi, ni fait suivre à leurs collaborateurs, une formation spécifique sur l’enfant. Si 18% l’ont fait une fois (23% chez les opticiens sous enseigne, contre 15% chez les indépendants), seulement 9% le font régulièrement.
Le prix public excède rarement 150 €
Pour l’enfant, vous ne privilégez pas le low-cost, loin de là. En effet, ce sont les montures de 100 à 150 euros qui sont les plus présentes dans vos magasins : elles représentent 50 à 75% de l’offre totale pour un tiers des points de vente, et même plus de 75% pour 16,3%. En revanche, au-delà de 150 euros, les modèles se font rares : pour 85% des répondants, ils pèsent moins de 20% de l’offre. On note par ailleurs une bonne présence des montures entre 50 et 100 euros, qui représentent 50 à 75% de l’offre pour plus d’un quart des répondants.
Les parents, points noirs des corners enfants
Au moment d’équiper un petit, nombre d’entre vous rêvent d’évincer ses parents ! Incontestablement, ces derniers se posent comme le point le plus enquiquinant de l’activité enfant (évoqué par 77%) quand ils veulent choisir la monture sans tenir compte de vos conseils. Parmi les choses que vous détestez le plus, vous êtes aussi 18,5% à pointer « les ophtalmologistes qui ne sont jamais contents de l’équipement » et 17% à vous montrer agacés par « les enfants qui pleurent, s’agitent et vous font perdre patience. »
Une mission de santé visuelle avant tout
Pour 8 opticiens sur 10, équiper les enfants relève avant tout de leur devoir : il s’agit d’une activité à part entière, car « il est normal de donner la meilleure vision à tous », même si cela se montre moins rentable que l’équipement des adultes. Un tiers d’entre vous ne néglige pas cependant ses avantages économiques, estimant que cette activité est « un moyen de capter la clientèle des parents. » Et pour 27%, c’est aussi un « moyen de faire valoir son professionnalisme auprès des prescripteurs et/ou des Ocam. »
Votre principal plaisir : donner la meilleure vue possible aux plus jeunes
Certes contraignante, l’activité enfant vous réserve aussi pas mal de satisfactions. La première est de donner à votre petit client toutes les chances de réussite. Pour 72,5% d’entre vous, le principal plaisir est en effet de « vous dire que cet enfant pourra suivre une scolarité normale grâce à ses lunettes. » Il dépasse largement les bénéfices lucratifs, même si ceux-ci restent aussi très plaisants : vous êtes 48% à apprécier le fait de « voir revenir les parents acheter leur propre équipement. »
Vos témoignages, touchants et drôles…
Dans le cadre de notre enquête, vous êtes nombreux à nous avoir fait part de vos bons souvenirs et de vos anecdotes survenues en équipant des enfants. Nous vous livrons ici un petit florilège, qui témoigne souvent de l’attention toute particulière que vous portez à votre jeune clientèle.
Je citerai l’exemple d’un enfant porteur de lunettes non adaptées, qui venait juste d’être détecté dyslexique. Une fois bien équipé de lunettes confortables, avec une forme de verre qui ne permet pas de regarder en dehors, sa dyslexie a été revue “à la baisse”. Presque du jour au lendemain, son comportement a été plus calme, son apprentissage plus aisé. Conclusion : le choix de la monture est primordial.
Je me rappelle d’un enfant avec une très grosse myopie qui, pour la première fois, installe ses lunettes sur son nez et découvre le visage de sa maman avec un grand “Ohhhh !”
Une maman aide sa fille a choisir ses lunettes. La petite tombe amoureuse d’une monture violette que la mère n’aime pas. Elle passe un quart d’heure à lui faire changer d’avis. L’enfant abdique pour une rose plus conforme aux souhaits de la mère, qui lui dit finalement : “la violette est pas mal…”. Comment rendre dingues l’enfant et moi ! Mais à part ça, j’adore faire essayer aux petites frimousses et rassurer les parents. Enfin ceux qui nous écoutent !
Une mère dit à son enfant turbulent : “Si tu continues, la dame va se fâcher…” Comme si c’était à nous d’élever leurs enfants terribles ! Un jour c’en était trop, j’ai répondu avec un grand sourire : “C’est vrai, je peux ?”
Deux enfants pleuraient dans mon magasin : l’un parce qu’il doit porter des lunettes, et son frère parce qu’il ne doit pas en porter…
Les enfants ont de ces questions ! “Comment je vais voir avec l’étiquette sur le verre ?” Nombre de parents, qui savent pourtant que les lunettes rondes ou ovales en plastique sont fortement conseillées (par moi-même ou l’ophtalmologiste) prennent des montures en métal carrées !
Notre enquête, réalisée via un questionnaire Internet du 13 au 29 juin 2014, a été élaborée sur la base des réponses recueillies auprès de 181 opticiens (63,5% indépendants et 36,5% sous enseigne).
